di Giovanni Chiaramonte. Con la sua nuova messinscena di Carmen al Théâtre Royal de La Monnaie, Dmitri Tcherniakov non si limita a reinterpretare un classico del repertorio operistico: ne decostruisce le fondamenta narrative e simboliche per proporne una rilettura radicalmente contemporanea, clinica, antropologica e tragica al tempo stesso. Quella che offre non è tanto una rappresentazione, quanto un’esperienza liminale, un rito di passaggio attraverso gli strati sommersi del mondo psichico. Iscrivendo Carmen entro un dispositivo di psicodramma terapeutico, Tcherniakov non presenta soltanto un’opera, ma coinvolge l’inconscio dello spettatore in un vero e proprio processo catartico.
La scena non è più l’Andalusia romantica, ma una sala grigia, impersonale, che evoca un centro di salute mentale contemporaneo. Questo spazio neutro, quasi ansiogeno nella sua sobrietà, si trasforma in un doppio concreto dello spazio interiore del "paziente", Don José. Lungi dall’essere una cornice illustrativa, la scenografia diventa metafora del teatro interno: ciò che vi si rappresenta è il riflesso di uno stato psichico, di un tentativo di ricostruzione dell’identità attraverso la ripetizione drammatica.
In questo contesto, l’azione dell’opera è inquadrata come uno psicodramma diretto, una forma di terapia di gruppo ispirata a Jacob Moreno, in cui il soggetto è invitato a rivivere e mettere in scena episodi cruciali della propria storia affettiva, sotto l’occhio vigile di terapeuti e facilitatori. Gli altri personaggi non sono più semplicemente individui, ma proiezioni archetipiche, figure di transfert. Carmen, in questa prospettiva, è meno un essere reale che un catalizzatore emotivo, una finzione terapeutica costruita per far emergere le zone rimosse del desiderio, della violenza e del vuoto.
Interpretata da una straordinaria Stéphanie d’Oustrac, Carmen qui supera il ruolo di personaggio per farsi archetipo sacrificale, schermo di proiezione del fantasma e del timore maschile. All’interno del dispositivo psicodrammatico, è una figura ideata per risvegliare in Don José i traumi profondamente sepolti legati alla sessualità, all’abbandono, alla perdita di controllo. La sua sensualità è codificata in maniera rigorosa, il gesto calibrato fino all’inquietudine, ogni movimento diventa veicolo di destabilizzazione psichica.
Ma questa Carmen non è onnipotente: è anch’essa prigioniera del meccanismo, vittima di un ruolo che può solo recitare e subire. Questo ribaltamento tragico — in cui colei che sembra provocare è in realtà offerta in sacrificio — genera una tensione emotiva di rara intensità. La catarsi, per lo spettatore, non nasce da una pietà o da un timore in senso aristotelico, ma da un riconoscimento intimo, quasi corporeo, del rischio d’identificazione, della perdita di sé.
Il Don José di Tcherniakov è uno dei ritratti maschili più laceranti visti di recente sulla scena lirica. Non è un criminale passionale, né un amante geloso, ma un uomo a pezzi, coinvolto suo malgrado in un processo terapeutico che non comprende e che lo oltrepassa. La sua voce è incerta, il canto disseminato di silenzi, crepe, tensioni. Ogni nota sembra scaturire da un abisso interiore, ogni esitazione racconta la confusione tra amore e dipendenza, tra seduzione e annientamento.
En Français
Carmen de Bizet, mise en scène de Dmitri Tcherniakov, Théâtre Royal de La Monnaie
par Giovanni Chiaramonte
Avec sa nouvelle mise en scène de Carmen au Théâtre Royal de La Monnaie, Dmitri Tcherniakov ne se contente pas de réinterpréter un classique de l’opéra : il en déconstruit les fondations narratives et symboliques pour en proposer une relecture profondément contemporaine, à la fois clinique, anthropologique et tragique. Ce qu’il offre n’est pas tant une représentation qu’une expérience liminale, un passage initiatique à travers les couches enfouies du psychisme humain. En inscrivant Carmen dans le cadre d’un dispositif de psychodrame thérapeutique, il ne donne pas seulement à voir une œuvre, mais il engage l’inconscient du spectateur dans un rituel de catharsis.
La scène n’est plus l’Andalousie romantique, mais une salle grise, impersonnelle, évoquant un centre de soins psychiatriques contemporain. Ce lieu neutre, presque anxiogène par sa sobriété, devient un véritable double de l’espace intérieur du « patient » Don José. Loin de l’illustration décorative, la scénographie se mue en métaphore du théâtre intérieur : tout ce qui s’y joue est le reflet d’un état psychique, d’une tentative de reconstruction identitaire à travers la répétition dramatique.
Dans ce contexte, l’action de l’opéra est encadrée comme un psychodrame dirigé, une forme de thérapie de groupe inspirée de Jacob Moreno, dans laquelle le sujet est invité à rejouer des scènes clés de son histoire affective, sous la supervision d’un groupe de thérapeutes et de facilitateurs. Les autres personnages ne sont plus simplement des individus, mais des projections archétypales, des figures de transfert. Carmen, dans cette perspective, est moins un être réel qu’un catalyseur émotionnel, une fiction thérapeutique conçue pour faire surgir les zones refoulées du désir, de la violence et du manque.
Incarnée par une bouleversante Stéphanie d’Oustrac, Carmen dépasse ici le statut de personnage pour devenir un archétype sacrificiel, un écran de projection du fantasme et de la peur masculine. Dans le cadre du psychodrame, elle est une figure construite pour éveiller chez Don José les traumas enfouis liés à la sexualité, à l’abandon et à la perte de contrôle. Sa sensualité est méthodiquement codée, sa gestuelle précise jusqu’à l’effroi, chaque mouvement devenant un vecteur de déséquilibre psychique.
Mais cette Carmen n’est pas toute-puissante : elle est, elle aussi, piégée dans la structure du dispositif, victime d’un rôle qu’elle ne peut qu’endosser et subir. Ce retournement tragique — où celle qui semble provoquer est en réalité offerte en sacrifice — produit une charge émotionnelle d’une intensité rare. La catharsis, pour le spectateur, ne vient pas de la pitié ou de la peur traditionnelles, mais d’une reconnaissance intime, presque corporelle, du vertige de l’identification et de la perte de soi.
Le Don José de Tcherniakov est l’un des portraits masculins les plus déchirants qu’on ait vus récemment sur une scène lyrique. Il n’est pas un criminel passionnel, ni un amant jaloux, mais un homme en lambeaux, engagé malgré lui dans un processus thérapeutique dont il ne maîtrise ni les règles ni les effets. Sa parole est incertaine, son chant parcouru de silences, de fêlures, de tensions. Chaque note semble surgir d’un gouffre intérieur, chaque hésitation trahit la confusion entre l’amour et la dépendance, la séduction et l’annihilation.
Foto: ©Uhlig