Recensione di Fabienne Maugey-Cadilhac. Révélation (Red in blue trilogie) texte Léonora Miano, script et mise en scène Satoshi Miyagi.
Comment parler d’un passé douloureux qui hante l’inconscient des peuples? Comment à la fois évoquer des faits avérés et datés tout en réfléchissant à leur universalité?
Le recours à la mythologie semble être le chemin le plus approprié. Et c’est le choix que fait Léonora Miano, écrivaine française d’origine camerounaise dans un magnifique texte théâtral, pour évoquer la responsabilité de chefs du continent africain en ce qui concerne le «déplacement transatlantique de populations subsahariennes», comme le nomme l’auteure pour mieux mettre en valeur cette violence humaine. Les actes condamnables de nos ancêtres sont toujours sources de désarroi et il est nécessaire pour chacun de nous de nous confronter au passé , de réfléchir à la portée de nos actes.
Dans le mythe qui nous est raconté, ce passé mal assumé provoque une grève des âmes qui refusent de se réincarner dans de nouveaux corps. Les âmes demandent que leur soient révélées les raisons pour lesquelles certains n’ont pas hésité à vendre certains des leurs aux «étrangers venus de l’eau». La double originalité de ce spectacle est non seulement dans le recours au mythe porteur d’images et de poésie mais aussi dans le choix du metteur en scène japonais Satoshi Miyagi qui permet de croiser les univers africains et japonais, d’éviter ainsi la confrontation Afrique /Occident, Noir/Blanc, de créer un univers esthétique inédit et de permettre ainsi une réflexion universelle.
Comme il l’avait fait à Avignon en 2017 avec la mythologie grecque dans Antigone, Satoshi Miyagi souligne la proximité de la vision africaine de l’âme des réprouvés qui flotte après la mort avec la vision japonaise.
Le spectacle envoûte : le jeu subtil et réglé des comédiens, l’esthétique japonaise des costumes, du décor et de la musique charment. Les musiciens soulignent et accompagnent le drame qui se joue dans un univers fantasmagorique plein de poésie, ils s’adressent ainsi, comme le dit Satoshi Miyagi, aux âmes des morts.
Grâce à cette mise en scène pleine de beauté et de mystère, nous sommes à la frontière entre deux mondes, le monde des morts et des vivants, le monde de l’Asie et de l’Afrique et ce faisant nous sommes au cœur de l’expérience humaine.
Fabienne Maugey-Cadilhac
du mercredi au samedi à 20h30, le mardi à 19h30 et le dimanche à 15h30
création à La Colline Grand théâtre
durée du spectacle 2
spectacle en japonais surtitré en français